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Les clauses d assurance introduites en cours de bail vs acceptees dès le debut

Les clauses d assurance introduites en cours de bail vs acceptees dès le debut

Les assurances de biens et de responsabilité civile sont de plus en plus réclamées par le propriétaire à la signature du bail. En effet, un locateur peut-il insérer une clause au contrat demandant aux locataires la preuve d’une souscription à une telle assurance? Or, si jamais le propriétaire ne l’a pas fait à la signature du bail, peut-il incorporer une telle clause à la reconduction de ce dernier? Dans le même ordre d’idée, un locataire qui refuse d’accepter la nouvelle clause d’assurance est-il dans son droit de le faire?

Tout d’abord, sachez que pour modifier votre bail lors de sa reconduction, en tant que propriétaire, vous devez respecter certaines conditions. En effet, vous avez l’obligation de donner un avis à votre locataire de la prochaine modification. De plus, si ce dernier refuse les changements apportés, vous avez la possibilité de vous adresser au tribunal qui pourra décider du sort des modifications et ce, si vous intentez votre demande « dans le mois de la réception de l’avis du refus » . Une fois dépassé ce délai et sans que vous ne déposiez une demande à la Régie du logement, le bail sera automatiquement renouvelé mais sous les anciennes conditions.

Dans le cas d’un ajout d’une clause d’assurance à un bail qui n’en comportait pas initialement, le principal obstacle à une telle modification est la notion de clause abusive. Selon l’article 1901 C.c.Q., « Est abusive la clause qui stipule une peine dont le montant excède la valeur du préjudice réellement subi par le locateur, ainsi que celle qui impose au locataire une obligation qui est, en tenant compte des circonstances, déraisonnable. » La même disposition stipule qu’une telle clause est alors nulle « ou l’obligation qui en découle, réductible. »

Pour ce qui est de la clause d’assurance introduite en cours de bail sans qu’elle n’existe à la signature initiale de ce dernier, la jurisprudence abonde pour expliquer qu’il s’agit là d’une clause abusive. À titre d’exemple, dans Gagnon. c. Gauthier (2012 QCRDL 43869), alors que le propriétaire rajoute une clause obligeant le locataire à se prendre une assurance dans un nouveau règlement de l’immeuble rédigé en cours de bail, la Régie du logement est catégorique à l’effet que cette clause est abusive car on impose des frais supplémentaires au locataire, frais dont la valeur ne peut être déterminée d’avance.

Similairement, dans Innovest inc. c. Grier (2011 QCRDL 16473), alors que la clause n’oblige pas le locataire à souscrire une assurance mais plutôt lui « suggère fortement » (par. 7) de le faire, la Régie du logement vient à la même conclusion. Effectivement, la Régie explique qu’en rédigeant qu’il ne sera pas responsable de tous les biens du locataire, le propriétaire limite sa responsabilité mais en impose une au locataire, même dans les situations de dommages non causés par sa faute.

Par conséquent, faire la distinction entre un cas où le bail contient déjà une clause d’assurance contrairement à celle où la clause n’est rajoutée que durant le renouvellement du bail est primordial. En effet, dans Tassé c. Savard (2011 QCRDL 42562), le propriétaire décide d’ajouter comme condition au bail que les locataires doivent lui présenter deux fois par an la preuve d’une souscription d’assurance de biens et de responsabilité civile. La Régie du logement précise tout de suite que d’ajouter une clause d’assurance en cours de bail représente une clause abusive car il s’agit alors d’une charge financière imposée au locataire. À l’opposé, elle explique que si jamais les parties avaient signé le bail dès le départ avec une clause d’assurance, leurs intentions communes prévalent et il est tout à fait légal pour elles de procéder ainsi. Une fois une telle clause déjà existante, si au cours du bail le propriétaire désire simplement ajouter une précision, il ne s’agit pas d’une clause abusive puisque n’en découle pas une contrainte financière excessive ni l’imposition d’une obligation. En effet, comme l’engagement de prendre une assurance subsiste déjà, le fait de demander la preuve de celle-ci à chaque année ne constitue aucunement un fardeau économique additionnel.

Penchons-nous également sur la cause 1313 Chomedey c. Lévesque (2011 QCRDL 48820). La Régie du logement y explique que dans le nouveau Règlement d’immeuble que le propriétaire propose au locataire, la clause d’assurance vient modifier celle déjà existante dans le règlement antérieur. La différence dans le nouveau document est à l’effet que la responsabilité civile du locataire est réduite mais qu’une précision est émise au niveau de sa responsabilité à l’égard des gestes de ses visiteurs. Comme la locataire avait déjà accepté la clause en vue de la prise d’une assurance dans l’ancien règlement, les ajouts ne constituent pas une clause abusive d’autant plus que la responsabilité à l’égard de ses visiteurs existe même sans clause, en raison de l’article 1862 C.c.Q.

Inclure une clause d’assurance représente une situation bénéfique autant pour le propriétaire que pour le locataire selon l'APQ.  Toutefois, soyez prudents surtout si vous tentez d'ajouter cette clause en cours de bail, en cas de refus la Régie pourrait conclure qu'on ne peut ajouter l'exigence d'assurance. N’hésitez pas à contacter les services juridiques de l’Association des propriétaires du Québec pour toute question et conseil.

 

Élène Moussa

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