Quand survient un
sinistre dans un immeuble en copropriété divise, le
syndicat se fait opposer divers arguments tant de la part d'un
copropriétaire à l'origine du sinistre que celle de
l'assureur de celui-ci, à l'effet que c'est l'assureur du
syndicat qui doit s'en charger et que ni le copropriétaire, ni
son assureur sont concernés par cette affaire. Le fait pour
ces intervenants d'adopter une telle position découle souvent
d'une mauvaise compréhension des assurances en copropriété
divise et des règles de la responsabilité civile.
Le
syndicat a un intérêt assurable dans tout l'immeuble, y
compris les parties privatives. Il doit souscrire des assurances
contre les risques usuels, tels le vol et l'incendie, couvrant la
totalité de l'immeuble, à l'exclusion des améliorations
apportées par un copropriétaire à sa partie. Le
montant de l'assurance souscrite correspond à la valeur à
neuf de l'immeuble. (article 1073 C.c.Q.) Selon les commentaires du
Ministre de la justice, la raison d'être de cette disposition
est d'éviter la multiplication des couvertures d'assurance
souscrites par les copropriétaires, ce qui aura pour effet de
rendre le règlement de sinistres très complexe.
Donc,
le copropriétaire doit souscrire des assurances couvrant les
améliorations qu'il pourra apporter à sa partie
privative, et souscrira en même une couverture couvrant les
conséquences dommageables découlant de sa
responsabilité civile. Toute personne a le devoir de respecter
les règles de conduite qui, suivant les circonstances, les
usages ou la loi, s'imposent à elle, de manière à
ne pas causer de préjudice à autrui. Elle est,
lorsqu'elle est douée de raison et qu'elle manque à ce
devoir, responsable du préjudice qu'elle cause par cette faute
à autrui et tenue de réparer ce préjudice, qu'il
soit corporel, moral ou matériel. Elle est aussi tenue, en
certains cas, de réparer le préjudice causé à
autrui par le fait ou la faute d'une autre personne ou par le fait
des biens qu'elle a sous sa garde. (article 1457 C.c.Q.).
Lorsqu'un
copropriétaire cause lui-même un sinistre dans
l'immeuble, la couverture d'assurance du syndicat entrera en ligne de
compte à la condition que l'évaluation des dommages se
chiffre à un montant supérieur à la franchise
d'assurance prévue au contrat d'assurances du syndicat. La
franchise est un premier montant non-assurable et lorsque
l'évaluation des dommages est inférieure à ce
montant, l'assureur du syndicat n'a aucune obligation d'indemniser le
syndicat. Alors, il existe un dommage réel, lequel doit être
réparé mais à qui doit payer pour les
réparations?
Il faut comprendre que l'intérêt
assurable du syndicat dans les parties privatives et communes est une
création du Code civil du Québec: le syndicat a un
intérêt assurable sans qu'il soit le propriétaire
de l'immeuble. Toutefois, la jurisprudence majoritaire nous indique
qu'il ne revient pas au à la collectivité des
copropriétaires représentée par le syndicat
d'assumer les conséquences monétaires qui découlent
de la faute de l'un d'eux: «Les montants non couverts, telle la
franchise, constituent une perte dont le copropriétaire sera
redevable au syndicat. (....) Il serait d'ailleurs contraire aux
règles fondamentales applicables en droit civil que de
demander à l'ensemble des copropriétaires d'assumer la
perte résultant directement de la faute de l'un entre
d'eux»1
Donc, lorsqu'une déclaration de perte excède
le montant de la franchise prévue au contrat d'assurance du
syndicat, l'assureur de celui-ci versera une indemnité après
avoir déduit le montant de la franchise. Le syndicat sera donc
confronté à un manque à gagner dans les fonds
disponibles pour effectuer la remise en état des lieux. Le
syndicat doit tout de même procéder aux travaux et
combler ce manque à même les fonds communs du syndicat,
mais préserve ses recours contre le copropriétaire
fautif pour le montant de la franchise.
À plus forte
raison, lorsque aucune indemnité n'est versée par
l'assureur parce que le montant des dommages est inférieur au
montant de la franchise fixée par le contrat d'assurance du
syndicat, le montant total des dommages est donc non-assurable et
constitue une perte résultant directement de la faute
personnelle d'un copropriétaire, ou en raison de la
responsabilité de ce dernier du fait d'un de ses biens ou
d'une personne dont il est légalement responsable.
Dans
les deux cas, le syndicat pourra exiger du copropriétaire
fautif qu'il rembourse le syndicat pour les montants déboursés
sur une base temporaire au moyen d'une mise en demeure. À
défaut pour le copropriétaire de payer volontairement
cette somme, le syndicat devra prendre une action en justice contre
le copropriétaire en la la forme d'une requête en
dommages.
Le copropriétaire transmettra probablement
une copie de la mise en demeure ou de l'action en dommages à
son assureur. En réponse à la réclamation du
syndicat l'assureur du copropriétaire niera possiblement la
responsabilité de son assuré, ou soulèvera
l'argument qu'il revient au syndicat et donc la collectivité
des copropriétaires à assumer le montant des dommages,
ou bien la franchise d'assurance. Une telle prise de position,
laquelle est mal fondée en droit à la lumière
d'une jurisprudence abondante sur le sujet a souvent pour effet de
ralentir le règlement du dossier et donne lieu souvent à
des litiges impliquant le syndicat, le copropriétaire fautif
et son assureur.
Des dispositions particulières de la
déclaration de copropriété devraient être
étudiés dans chaque cas afin de déterminer
l'incidence sur les devoirs et responsabilités du syndicat et
du copropriétaire concerné.
Lorsque survient un sinistre en copropriété divise
Publié le par Me Kevin J. Lebeau
Sujet(s): Copropriété,
Source: Messier Soucy Avocats
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